Violette Hurlevent et le jardin sauvage de Paul Martin et J-B Bourgois

J’avais reçu une première partie de ce roman il y a quelques semaines avec les deux cent premières pages en épreuves non corrigées (ENC) et déjà, je sentais que je tenais là un livre précieux, à l’imaginaire débordant, qui allait faire rêver un nombre incalculable d’enfants. Déjà, je passais de longues minutes à admirer les dessins, suivre des doigts leurs traits et leurs silhouettes esquissées. Je n’aurais jamais cru qu’il serait si gros, si beau, avec ses dorures qui le rendent d’autant plus extraordinaire. Merci aux éditions Sarbacane pour l’envoi de ce service de presse ❤

Mon résumé

Depuis que Violette, son frère et sa mère ont déménagé dans l’ancienne maison de son grand père, Stanislas, rien ne va plus. Sa chambre sent le moisi, la maison est sinistre et le jardin ressemble à une décharge ! Elle en veut à la terre entière, à son frère, à sa mère, mais surtout, à son père, sans qui ils n’auraient pas été obligés de fuir dans ce coin reculé entre ville et campagne où tout semble figé. Tout ? Peut-être pas. Car au delà de sa fenêtre le jardin sauvage s’agite, des bruits courent dans les galeries souterraines, et ses habitants se réveillent.

Elle découvre une photo avec une jeune fille juchée sur un chien, le regard grave, « la protectrice du jardin ». Alors elle monte sur Pavel, son fidèle destrier et part à l’aventure. Et il se met à parler. Et les taupes à discuter. Et les plantes à grogner. Et les pierres à gronder. Le jardin sauvage prend vie et Violette est investie d’une mission.

Mon avis

Quel roman ! Illustré de bout en bout avec des traits fins et sinueux, il nous invite à un voyage merveilleux en compagnie de Violette et des habitants du jardin. « Hurlevent ». Un nom d’héroïne de conte, de princesse guerrière, un nom qui résonnera longtemps sur toutes les lèvres des jardineux. Car Violette Hurlevent n’est pas n’importe qui, c’est la protectrice du jardin, et grâce à elle, il pourra peut-être réchapper de la terrible Tempête qui s’annonce.

« Le jardin était figé. Oublié depuis bien longtemps. Dans les arbres, aucun chant d’oiseau. Autour des fleurs, nulle abeille ne bourdonnait. Pas un papillon, pas une coccinelle ni même un moucheron. Quelque tulipes, au garde à vous, semblaient attendre une inspection qui ne viendrait jamais. Par endroits, une épaisse couche de poussière s’était accumulée sur les plantes, les arbres et les rochers. Même l’eau des mares et des ruisseaux paraissait immobile ! Et dans les ombres, là où le soleil ne posait jamais ses rayons, la neige s’étendait, lisse et monotone »

Dans ce roman au goût de merveilleux il y a indéniablement une inspiration à la Caroll, Violette semble bel et bien, à l’instar d’Alice, passer de l’autre côté d’un miroir. Elle seule a accès à ce jardin sauvage aux vastes étendues de forêts d’épineux en pelouse aux jardineux, d’océans verts en pyramides de feuilles. Les paysages s’enchaînent et le temps s’arrête. Vraiment ? Pourtant c’est une véritable course contre la montre que doit gagner la jeune fille, car Kaliban n’attend pas. Monstre, ombre menaçante, vide abyssale, tempête, ce qui se prépare en secret n’a rien de bienveillant et Violette doit se préparer pour l’affronter. S’ensuit une chasse aux reliques anciennes du jardin et où l’on retrace le chemin d’une autre protectrice qui partage un lien étrange avec notre héroïne.

N’oubliez pas toutefois que le merveilleux peut-être sombre… et que si les fourmis se transforment en « compagnie des petits chemins », que trois taupes accompagnent Violette, que les chiens se mettent à parler et que les oiseaux sont, parfois, des livres il y a aussi les sapins qui rampent et craquent, la horde verte qui déferle sur le jardin, les glaneurs qui aspirent la vie de leur victime et un chien enragé. On comprend assez vite ce qui se cache derrière Kaliban mais je vous laisse le comprendre par vous-même au cours de votre lecture (parce que oui, vous allez lire ce livre).

« Elle savait que le Jardin Sauvage existait depuis bien longtemps ; au cours des siècles, il s’était développé, avait trouvé son équilibre… D’autres gens qu’elle y avaient déjà vécu des aventures, l’avaient parcouru, exploré et modifié. A chaque changement de visiteur, son histoire évoluait, comme un spectacle qui évolue avec l’arrivée de nouveaux spectateurs. Non, pas des spectateurs : des comédiens. Elle était la Protectrice, et son rôle, c’était de faire que le spectacle ne tourne pas à la catastrophe.
— Pour le moment, c’est plutôt mal parti, soupira t-elle ».

J’ai adoré suivre cette jeune héroïne qui montre toute l’innocence et la ténacité des enfants face à l’adversité : elle tient tête à des cailloux, arrangent des alliances à grands renforts de cornichons et chipolatas, et se laisse parfois emportée par sa sauvagerie enfantine (pâquerettes décapitées, touffes d’herbes arrachées…). Pourtant, derrière son courage, se cache aussi des peurs profondes qui resurgissent parfois, une cave sombre dans laquelle elle a été enfermée, ou un père violent. Sans trop entrer dans les détails, l’auteur et le dessinateur rendent compte de ces éléments avec justesse et délicatesse. Petit bémol toutefois sur les relations familiales dont on voit très peu de choses et que j’aurais aimé voir un peu plus approfondies.

Je crois que j’aurais également aimé avoir une carte du Jardin Sauvage, je n’arrivais pas à me repérer et ça me donnait l’impression que le jardin changeait sans cesse, un peu comme les escaliers du château de Poudlard entre Lac Chipolata, Cité Factice, Océan vert et autre Mont dégarni. Le Jardin était flou comme une photo polaroïde. Un effet de style qui ne plaira pas à tous mais qui moi, m’a convaincue.

En résumé

Sur fond de récit initiatique où Violette doit apprendre à vaincre ses peurs pour avancer, on entre dans un monde merveilleux où les noms des lieux côtoient avec beaucoup d’humour l’apparence des personnes qui le peuplent. L’héroïne, têtue et sauvage, cache ses larmes derrière un masque de courage convaincant. Intrépide, elle vous entraînera avec elle dans ce jardin aux multiples facettes, empli de poésie et de créatures fantastiques. Un roman en droite ligne d’Alice aux Pays des Merveilles de Lewis Carroll et du Monde de Narnia de C.S. Lewis ❤

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