Un peu plus près des étoiles de Rachel Corenblit

Je commence ma PAL de décembre avec de l’émotion, du drame, et de l’amour. Un grand merci à la masse critique Babélio de toujours pouvoir me faire découvrir des éditions que je ne lis pas souvent et des auteurs inconnus.

Résumé éditeur

La fille qui se trouvent en face de moi n’avait plus de visage. Mon père m’avait prévenu : « si tu rencontres les patients, tu ne fais pas de commentaires. Tu risques d’être surpris, mais surtout ne montres rien à ces pauvres gens. Ils ont déjà tellement souffert. Tu vas en croiser pas mal, ici, des abîmés et il y a même un secteur pour les enfants et les ados ».
– Hé, cache ta joie, Machin. C’est super romantique comme rencontre. Manque plus que les violons, non ?

Un ado solitaire. Sept gueules cassées.
Une histoire d’amitié étourdissante, loin des apparences.

Mon avis

Par bien des égards, Un peu plus près des étoiles m’a fait penser à Coeur battant d’Axl Cendres. Ici, nous ne sommes plus du côté des hors la vie, des suicidants mais du côté des gueules cassés, des grands brûlés, de ceux qui ont vu passer la mort de trop près et qui s’en sont sortis, estropiés à vie, le corps en miette, la tronche arraché, des membres en moins.

Au milieu d’eux il y a Rémi. Orphelin d’une mère schizophrène qui a tenté de le noyer à l’âge de quatre ans, il ère avec son père d’hopital en hopital, de ville en ville et sillonne la France sans jamais s’arrêter nulle part. Pas le temps de se créer des amis, pas le temps d’éprouver de l’amour ou de l’amitié, il ne reste jamais bien longtemps au même endroit. Comme si s’installer allait déclencher une avalanche d’événements, de catastrophes sans précédent. Comme si s’arrêter c’était aussi arrêter de fuir les souvenirs d’une femme qui les avait aimés à vouloir les détruire. Rendue folle. Parce que s’arrêter c’est aussi affronter. Prendre le temps. Se regarder à l’intérieur de soi même et tenter de trouver des réponses.

Rémi arrive donc dans cette petite vie tranquille et bien rangée. Boulet de canon, étincelle, lui n’est pas brisé à l’extérieur, certains pourraient dire qu’il est même beau, mais tout dans son attitude crie la solitude, la peur, le renfermement. On peut être brisé de l’intérieur finalement. Tout couturé de cicatrices. Mais on ne s’en rend pas forcément compte.

« Si je te laisse entrer, tu seras comme le loup dans la bergerie. Tu vas tous les décimer avec ton regard sans pitié et ton air d’être mieux que nous »

Tout change lorsqu’il les rencontre : Adonis, Maxime, Zoé, Millie, Clothilde, Pascale et Sara. Tous cabossés. Tous horriblement moches. Nez en moins, mâchoire défoncée, visage couturé de cicatrices, des beautés cassées, brisées, brûlées. La peau fond. Leurs faces, leurs corps, tout semble redessiné, remodelé par des mains d’enfants. C’est à leur contact que ses propres blessures se rouvrent, s’exposent, pour mieux cicatriser peut être. Et puis il y a Sara, avec sa casquette bleue électrique et ses yeux qui le tétanisent. Brûlants. Vibrants. Son corps lui hurle de s’enfouir, de s’éloigner de ces monstruosités, mais ses yeux le figent. Le poussent à rester. Le défient.

Cette histoire est très belle. Elle montre comment on peut voir au delà de l’apparence. Comment on peut apprendre, grandir, au contact des autres. Elle n’est pas rose, elle n’est pas jolie, elle n’est pas spécialement joyeuse. Partout la tension règne. Un mot de travers, un regard, tout est si facilement lisible, clair. Si facilement blessant. Rémi n’est pas un gentil garçon. Il n’est pas particulièrement sensible aux autres. Il n’a pas spécialement envie de sauver leur humanité. Peut-être même est-il méchant parfois, insensible, cruel. Et pourtant… L’adolescent avec son walkman sur les oreilles, les cassettes de sa mère en boucle, change. Evolue. Grandit.

J’ai pris ses mains dans les miennes. Puis je l’ai serré dans mes bras. Pas fort. Ne pas l’étouffer, penser qu’il était fragile. Son corps contre le mien ne pesait pas grand-chose. Et son odeur était un mélange de désinfectant, de médicament, et de chewing-gum à la fraise. J’ai oublié qu’il était tordu. J’ai oublié qu’il était laid. J’ai oublié son visage et sa maladie.

Et il n’est pas le seul. Avec lui c’est tout un monde qui se remet à tourner, il était la roue manquante, le mécanisme absent. Même ce père immobile, oublié, semble enfin se remettre à exister, à vivre, à sourire et à rire au point d’en choquer son fils qui l’a toujours connu sombre, mécanique, stoïque.

En résumé

Avec une écriture très fluide, parfois emprunte de poésie hachée, Rachel Corenblit signe un formidable plaidoyer pour la reconstruction, l’amitié et les regards portés au delà des apparences. Un roman à mettre entre toutes les mains ❤

4 commentaires sur “Un peu plus près des étoiles de Rachel Corenblit

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