La Rose des Carcasses de Wilhelmina Wilder

Aujourd’hui je viens vous présenter un roman auto-édité…et quel roman auto-édité ! La Rose des Carcasses est le premier roman de Wilhelmina Wilder (nom de plume) que j’ai reçu grâce à Karenine. Publier sous le logo de Librinova, j’ai eu la chance de rencontrer et de discuter avec l’autrice pour Karenine puisque je travaille pour eux avec mon entreprise Esperluète. Déjà, parler avec elle avait été une super expérience, j’ai pu découvrir une autrice assez cynique et drôle, j’avais donc d’autant plus envie de découvrir son roman et je ne fus pas déçue du voyage !

Résumé Librinova

Angleterre, XIXe siècle. Adrian Meredyth est un artiste très en vue de Londres. Toujours suivi par son fidèle valet, il va de mécène en mécène en évitant soigneusement la vie mondaine qu’il abhorre. Malgré tout, il ne peut échapper aux réceptions raffinées de son bienfaiteur du moment, Lord Pelham. Mais alors qu’il y assiste à contrecoeur, son hôte assassiné et exposé dans une mise en scène macabre. Le meurtrier semble doté de capacités extraordinaire, et son identité risquerait de faire surgir les ombres de jadis…

Une nuit, dix ans plus tôt, a bouleversé la vie de l’orphelin crasseux qu’Adrian était alors. Cette nuit qui a fait de lui un aristocrate exaucé, non seulement pas le talent, mais également par un véritable démon à la langue bien pendue. Le discret valet qui l’accompagne partout n’est autre que Melmoth, l’un des seigneurs de l’Enfer, à qui il a abandonné son âme en échange de sa servitude. L’artiste décide de mettre à profit cet incroyable pacte pour traquer l’assassin, quitte à déraciner un passé tragique.

Mon avis

La première chose qui frappe quand on ouvre le roman, c’est la langue. Dès les premières lignes on sait que cette lecture sera exigeante, qu’il faudra de la patience et peut-être relire certaines phrases pour les comprendre…et ça ne m’a pas dérangée, bien au contraire ! J’ai d’autant plus plongé dans le XIXe que la langue châtiée avec laquelle il était décrit ne m’était pas familière. Si le début de ma lecture fut donc laborieux, le temps que mon cerveau habitué aux romans jeunesse et YA s’alligne sur ce nouveau langage, le texte se fait de plus en plus fluide au fur et à mesure des pages et on oublie bien vite le registre pour se concentrer sur l’intrigue.

« Ce fut à l’heure du crime que le ciel londonien, perpétuellement noirci de smog, revêtit un manteau de plus sombres ténèbres, tissé par la fumée qui s’élevait de l’église en proie aux flammes. Enflées, rubéfiées, purulentes de leur sacrilège festin, les langues de feu léchaient, dans leur inexorable ascension vers le toit en flèche du lieu saint, ses murs peints à la chaux – de ce blanc immaculé qui donna son nom au quartier de Whitechapel ».

Le premier chapitre s’intéresse à cette fameuse nuit, dix ans plus tôt, où Adrian, alors petit garçon, croque le corps gracile d’un chat à même le bitume. Attiré par des bruits de cris et de cavalcades, il fait la rencontre d’une femme à la beauté époustouflante que son âme d’artiste ne peut s’empêcher de vouloir dessiner, peindre, épouser. La peur dans ses yeux et ses appels au secours le pousseront à poursuivre la voiture qui l’emmène dans la nuit, alors même que son corps de petit garçon ne pourra rien pour la sauver de son funeste destin. L’eut-il fait que cela aurait sans doute changé le cours de l’histoire. Impuissant il assiste donc à son sacrifice dans une messe noire à laquelle il ne comprend rien, ivre de rage, il enjoignera le Seigneur des Ténèbres invoqué, Melmoth à faire passer les hommes présents de vie à trépas.

Dès le début donc, le roman se pare de violence, de sang, et d’invocations démoniaques, une pointe de surnaturel glauque, sombre et ténébreuse qui n’est pas sans rappeler les œuvres des grands de cette époque comme Le Portrait de Dorian Gray, ou encore Frankenstein. Il faut dire que le Londres du XIXe siècle, avec ses tueurs en série très connus, n’est pas des plus avenants alors que la révolution industrielle frappe aux portes de la ville et noircit les perpétuels nuages de la capitale. Qu’à cela ne tienne. Adrian est désormais aristocrate, gagne plus d’argent qu’il n’en dépense, est servi par un démon aux capacités de majordome stupéfiantes (entre la nourrice, le valet et le garde du corps). Il faut dire qu’Adrian est un personnage plutôt capricieux et cynique, qui pose sur le monde un regard sans fausseté. A travers ses yeux d’artiste, c’est l’âme des autres qu’il sonde. A ses côtés, son plus fidèle ami, un français du nom d’Edgar de Beaumont duquel il pourrait bien être amoureux…et qui agace profondément son majordome.

En un peu moins de cinq cent pages, l’autrice développe une intrigue qui prend son temps, entre enquête, pirouettes artistiques, et scènes macabres. On flirte gentiment avec le surnaturel sans jamais trop y baigner ce qui contribue à en faire un roman d’ambiance à la Penny Dreadful. On y rencontre aussi tout un tas de « freaks » pour l’époque comme ce qu’on appellerait aujourd’hui des drag queens ou des transgenres mais aussi des homosexuels. J’ai apprécié que Wilhelmina intègre des réflexions tout à fait moderne à cette époque qui l’est moins, comme pour nous rappeler que l’intransigeance, l’intolérance et la violence ont toujours fait partie de ce monde mais que l’on peut aussi le changer par des choses presque anodines, comme reconnaître l’autre pour ce qu’iel est, plutôt que ce qu’iel devrait être selon la morale.

Un indice sur l’auteur des crimes est donné…mais on y repense seulement à la fin quand l’autrice consent à nous révéler l’assassin. De ce côté-ci j’aurais apprécié un côté moins nébuleux et des indices un peu plus clairs mais cela permet une montée progressive de la tension dans le récit et nous enjoint à tourner les pages de plus en plus vite. J’aurais également voulu ressentir plus d’émotions de la part des personnages, bien qu’ils soient souvent sujets à la passion, à l’envie, au désir, ou à la colère, je suis davantage touchée par la peur, la tristesse ou la douleur or Adrian en est quasiment exempt. Cela peut s’expliquer (orphelin des bas fonds de Londres, âme donnée à un démon, cynisme du personnage) mais cela m’a manqué. Finalement, une de mes scènes favorites est justement le moment où Adrian fait montre de fragilité, lorsqu’il demande à son démon si celui-ci est heureux à ses côtés. On retrouve ici un côté un peu BlackButler (côté manga) ou Sorcery of thorns (côté romans YA) et j’avouuuuue mon côté romance surnaturelle à deux balles aurait adoré qu’il y ait un petit truc entre Melmoth et Adrian !

En résumé

La Rose des Carcasses est un premier roman auto-édité très bien construit à la langue exigeante. S’il m’a manqué de l’émotion pour me toucher véritablement, l’ambiance dans laquelle nous plonge l’autrice est glaciale, gothique et macabre digne du quartier de Whitechapel dans lequel l’aventure commence. Mais avec ce petit grain de folie et de surnaturel qui en font une aventure déjantée, loufoque, aux accents horrifiques.

2 commentaires sur “La Rose des Carcasses de Wilhelmina Wilder

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    1. Tu devrais te lancer 🙂 Pour un auto-édité c’est vraiment vraiment chouette. Je ne dis pas que j’ai des préjugés mais c’est souvent que je tombe sur des AE qui ressemblent plus à des fanfictions qu’à des romans où la plume est travaillée 🙂

      Aimé par 1 personne

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