Décalage. Toujours en décalage. J’écoute, je sens, je touche mais je ne suis pas là. Je suis un fantôme qui traverse le temps, l’espace et je papillonne à la recherche d’une lumière. La mienne est loin. Ma poitrine se tord de le revoir. Comme si respirer sans lui était devenu difficile. Impossible. Dépendance. Alors je papillonne. J’ai la tête qui tourne. Tequila. Rhum. Vodka. Citron. Sucre. Je papillonne. Je pars. Je quitte la lumière. Je rejoins les ombres. Et pourtant. J’écoute. Je sens. Ces corps qui dansent, chantent, dans la pièce d’à côté comme si plus rien existait. Ils forment des groupes. Qui se désolidarisent, se reforment, se déforment. Ils rient et pendant un temps cela me suffit, de les entendre rire, crier, chanter des tubes trop vieux que l’on ne peut passer qu’une fois qu’on a un peu bu. Sucre, rhum, citron vert. Je ressens encore plus ton manque et je deviens lunaire. Cette pièce est comme sourde, semblable à ma poitrine. Elle bat à un rythme invisible, le son des basses et des corps qui sautent. Et d’un coup la porte s’ouvre. Surprise. Stupeur. Ma poitrine s’est ouverte et le soleil a rejoint la lune. Alors je sors. Je rentre dans le mouvement, la masse, je laisse la lune dans la pièce, je la retrouverai bien assez tôt. Et je les aperçois, qui parlent, là, et je me dis qu’il existe dans le bruit des formes de silence. Je m’adosse au leur, perçois ce qu’ils disent tout bas, la culpabilité, la rancoeur, la tendresse, la confiance. Plus tard, ils partent et profitent de l’espace lunaire et je sens presque leur poitrines, à eux, qui se tordent. Et je me demande si on est toujours tous un peu moins solaires dans les bruits.
Soirée lunaire

Votre commentaire